Exo anonyme « Ce que je fais » : Je t'attends

“ Qu’est-ce que tu fais ?
-Rien ”
Encore une fois, surgie froncée, elle m’a trouvé. Rêveur agrippé à une branche, plumant le chat entre ses plis de ventre, suivant, ébahi, l’araignée pondeuse qui file sous les fraisiers.
“ Et arrête de bouder ! ”
Je remorquais mes genoux couronnés, les sandales à la bride presque arrachée et l’odeur du trèfle écrasé. Rencogné dans la cuisine aux carreaux frais, je regardais monter la buée de confiture en cuivres, infiniment.
Elle s’appliquait. Humectait les cellophanes, comptait les élastiques, collait sur toute chose un papier blanc:
Ici, un pot concentré, pot de vie, pot d’amour.

C’était pour plus tard. Elle avait promis. “ Mais tu peux lécher la bassine !”
Des provisions pour les matins acides à venir.

“ Sérieusement, il faut qu’on réfléchisse… - A quoi ? - A nous… Arrête avec cette tête d’enterrement, c’est agaçant. Tu n’es plus un gamin… Ton fils vient avec moi. D’ailleurs où étais-tu encore passé ? - Nulle part.”

Je reviens des cyprès, de la fontaine moussue où coulent, goutte à goutte, des mètres cubes pour chrysanthèmes orphelins. Des araignées là-bas mais noires. N’ont jamais d’œufs. Sur une étagère, Maman marbrée en petit pot. Ce que je fais ? Au bout de l’allée, je lis l’étiquette. Relis les lettres d’or. J’essaie de penser bien proprement : c’est ici, c’est maintenant.
Rien.
Dans le ciel atone glisse le ciseau d’une hirondelle.


Faim.
“ Gamin , tu as eu les yeux plus grands que le ventre… ”
En vain je les écarquille, brouillés. En vain je proteste.
J’ai toujours le ventre vide.
Bientôt un an que tu es partie .
Dodo, l’enfant Do ne dort plus guère.
Cinquante ans après, je dis que je sais enfin ce que je savais déjà.
Rien.
Ça ne sert à personne. Jamais. Mais je le fais quand même.
Le cœur accroupi près des griffes du chat, je rêve une fraise rouge et ses petits grains d’été vert, qui craquent sous la dent.

Rien mais le fais quand même.
Je t’attends.

Je comprends l'intention davantage que les textes.

Voilà pour moi un texte qui répond très bien à la consigne
En première lecture je ne comprends pas qui est ce "je", mais peu importe, je vais relire pour savoir, après, tant les indices m'accrochent, le gamin, les cyprès, la confiture, je peux me faire mon propre roman.

En relecture, je vois un gamin, gourmand (de vie), puis il grandit, franchit plus ou moins bien les absences, le troisième paragraphe est moins clair, pour moi, qui attends-il ? (ou quoi ?)

il me reste deux textes à découvrir, mais c'est actuellement le vôtre (le tien ?) qui me touche le plus. Me semble reconnaître la griffe.

voilà un texte qui va me donner du fil à retordre...j'aime bien ça,
je ne sais pas encore ce que je vais découvrir la dessous, pour l'instant j'avoue que ça me reste un mystère,
mais je sais déjà que j'aime énormément certaines trouvailles très poétiques.
un exo des plus originaux!

Spoiler:

J'aime BEAUCOUP
dodo l'enfant do, une piste ?

mais quoi qu'il en soit, et la forme et le propos, sans parler de l'écriture, me réjouissent

punaise.
je ne devais pas être encore là, déjà partie mais quand quelque chose m'intrigue...
donc j'ai relu...

je ne saurai pas dire,
pour l'instant je n'ai pas les mots.

c'est sublime.
ce texte irradie de je ne sais quoi.
voilà...

il est plein d'amour.

Je passe par là rapidement.
Super lecture.
Continuité, rupture, la vie qui va et s'en va. Aujourd'hui et hier. Et demain peut-être.
Cet exo place la barre très haut, vais probablement passer.

Je vois bien que c'est un texte qui renvoie à des images et je sens de la poésie là-dessous.
Cependant trop de choses me sont inaccessibles parce que je ne les comprends pas.
Je ne comprends pas
ce "surgie froncée",
l'image "plumant le chat entre ses plis de ventre" ,
la "buée des confitures en cuivre": ici je suppose que c'est une licence poétique, que les confitures cuisent dans une bassine de cuivre.
"Maman marbrée en petit pot"
"le ciel atone"

Quant au récit, au fond: il reste assez hermétique aussi pour moi.

Les commentaires lus après le texte m'ont incitée à relire, et re relire. Mais je ne vois rien venir.

Quelques images poétiques m'attirent, comme ce passage : Je remorquais mes genoux couronnés, les sandales à la bride presque arrachée et l’odeur du trèfle écrasé. Rencogné dans la cuisine aux carreaux frais, je regardais monter la buée de confiture en cuivres, infiniment., ou encore cette image que je trouve magnifique : "Dans le ciel atone glisse le ciseau d’une hirondelle", mais je ne parviens pas à faire le lien entre les trois parties, j'ai dû rater quelque chose au vu de certains commentaires (la boucle est bouclée).

j'aime.

Ce texte me parle, je me sens bien dans cette ambiance.
Toutefois, j'aurais fait exactement les mêmes remarques que Kilis sur les mêmes images qui m'ont échappées à moi aussi.

Une nostalgie emplie d'émotion qui touche, y a pas à dire. Un aspect hermétique aussi, qui peut dérouter et c'est pourtant ce qui me plaît dans ce texte, cette non-ouverture autour d'éléments mis en lumière sans pour autant être totalement dévoilés. Il y a une bonne part de secret dans ceci, la clandestinité des souvenirs qu'on ne refuse pas vraiment de partager mais qui pourraient s'égratigner au contact d'autres réalités. Et ça, j'aime beaucoup. Tout comme cette écriture douce, mature et à fleur de peau.

Ce que je crois avoir compris : une absence qui n'en finit pas de se ressentir, toute une vie, à coup de flash-back.
C'est nostalgique, triste, tendre. Et beau.

Il y a une beauté, de l'émotion, mais c'est un peu trop hermétique, je crois qu'il manque peu pour que ça prenne plus de sens sans perdre en émotion.

Tu anticipes un peu sur le jeu suivant et c'est drôlement bien, plein de saveurs, de senteurs et de douce absence...

Spoiler:

bon je ne vais pas faire comme CROISIC oh, la balance ! je reviens plus tard... :-))

Je pense que c'est Iris qui a le mieux saisi ce que je cherchais à faire ressentir.
J'ai conscience que le texte n'est peut-être pas très explicite aussi j'ai essayé une autre version(en évitant, j'espère, de tout aplatir). Vous me direz si c'est plus clair.


Je t'attends


“ Qu’est-ce que tu fais ?
-Rien. ”
Encore une fois, surgie froncée, elle m’a trouvé. Rêveur agrippé à une branche, plumant le chat entre ses plis de ventre, suivant, ébahi, l’araignée pondeuse qui file sous les fraisiers.
“ Et arrête de bouder ! ”
Je remorquais mes genoux couronnés, les sandales à la bride presque arrachée et l’odeur du trèfle écrasé. Rencogné dans la cuisine aux carreaux frais, je regardais monter la buée de confiture en cuivres, infiniment.
Elle s’appliquait. Humectait les cellophanes, comptait les élastiques, collait sur toute chose un papier blanc.Ici, un pot concentré, pot de vie, pot d’amour.

C’était pour plus tard. Elle avait promis. “ Mais tu peux lécher la bassine !”
Des provisions pour les matins acides à venir.

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“ Sérieusement, il faut qu’on réfléchisse… - A quoi ? - A nous…Je ne sais plus où j'en suis, où on va... Arrête avec cette tête d’enterrement, c’est agaçant. Tu n’es plus un gamin… Ton fils vient avec moi. Ce n'est pas toi qui t'en occuperas. D’ailleurs où étais-tu encore passé ? - Nulle part.”

Je reviens des cyprès, de la fontaine moussue où coulent, goutte à goutte, des mètres cubes pour chrysanthèmes orphelins. Des araignées là-bas mais noires. N’ont jamais d’œufs. Sur une étagère, Maman marbrée en petit pot. Ce que je fais ? Au bout de l’allée, je lis l’étiquette. Relis les lettres d’or. J’essaie de penser bien proprement : c’est ici, c’est maintenant.
Rien.
Dans le ciel atone glisse le ciseau d’une hirondelle.


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Faim.

 “ Gamin , encore les yeux plus grands que le ventre !”
En vain je les écarquille, brouillés. En vain je proteste.

Faim.
 
J’ai pour toujours le ventre vide.
Bientôt un an que tu es partie toi aussi.


Cinquante ans ici-bas, je dis que je sais enfin ce que je savais déjà.
Rien !
Dodo, l’enfant Do ne dort plus guère.

Ça ne sert à personne. Jamais. Mais je le fais quand même.
Le cœur accroupi près des griffes du vieux chat , je rêve une fraise rouge et ses petits grains d’été , qui craquent sous la dent.

Rien mais le fais quand même.
Je t’attends.

obi

bonjour obi,
je préfère la première version,
cette valse à trois temps m'emballe et même si je ne comprends pas tout, les images sont là et ça me plaît... il y a quelque chose de fort qui se dégage de ton texte et qui me parle, et si ça me parle c'est que tu m'as touchée, c'est l'essentiel pour moi.
je garde la première version... et je m'incline devant ton travail de ré-écriture.

C'était donc Obi-Wan Kenobi, un grand enfant. (Serait un ancien combattant de la guerre des étoiles, m'étonnerait po.)

Tout cela est un peu décousu pour moi, plein de choses qui se mélangent.

Pas super facile à capter en une fois, pour moi en tout cas, mais c'est très intéressant.

Le thème ce que je fais est ici exploité de façon parallèle selon moi (mais bon, il se peut que je ne comprenne rien, con comme je suis)

Allez...

Il a de l'avenir ce petit.

J'aime les deux versions et je suis ravie de découvrir cette belle plume, par le biais d'un exo anonyme c'est encore mieux !

je viens redire que même si je n'ai pas tout compris, il y a des lignes que j'ai trouvé si belles, que ça l'emporte sur absolument tout le reste.
ravie également de découvrir cette plume singulièrement poétique.
très original, je trouve.

je n'ai pas tout compris, un certain hermétisme m'empêchant d'entrer totalement dans le texte. Mais étrangement, la beauté de certaines tournures, l'ambiance générale m'ont permis d'apprécier ce très très joli texte malgré tout. Bien joué donc !

C'est différent et ça m'a beaucoup plu.
Des images qui parlent plus que les mots, d'où l'hermétisme dont certains ont parlé, mais c'est si joliment dessiné, suggéré et ça sert bien le propos d'un enfant qui n'a pas toujours les mots ce qui exacerbe probablement son ressenti.
Poétique à souhait et touchant.