Autre versant
+4
Pussicat
jfmoods
hi wen
Annie
8 participants
Page 1 sur 1
Autre versant
Sur la colline calcinée
où nul ne roucoule,
renoncer à l'ancolie
au narcisse, à la rancune,
rallier l'écorce et la ronce
se concilier les cailloux
la carline, la colère.
Accueillir au col
l'inconnu.
où nul ne roucoule,
renoncer à l'ancolie
au narcisse, à la rancune,
rallier l'écorce et la ronce
se concilier les cailloux
la carline, la colère.
Accueillir au col
l'inconnu.
Annie- Nombre de messages : 1452
Age : 73
Date d'inscription : 07/07/2010
Re: Autre versant
Trente-huit mots en comptant le titre.
Treize lettres de l'alphabet en tout.
Des vers excessivement courts, dépourvus de rimes, dans une alternance de 3 à 8 pieds.
J'admire la remarquable densité, le travail de virtuose qui permet ce feu croisé d'allitérations obsédantes (« c », « l », « n », « r », « s ») et d'assonances multiples, disséminées dans le tissu du poème.
C'est un véritable petit bijou d'écriture, Annie !
Les quatre verbes à l'infinitif, fixant le cap à suivre, dessinent un mouvement de gradation. Deux d'entre eux, centraux, sont construits en diérèse (« rallier », « se concilier »), appuyant doucement sur l'évidence de l'ouverture sur le monde. Dispensateur d'images particulièrement prégnantes, un abondant champ lexical de la nature (« colline », « ancolie », « narcisse », « écorce », « ronce », « cailloux », « carline », « col ») préside au déroulé de l'évocation. Si la rancune nous referme sur nous-mêmes, nous faisant invariablement remâcher le passé, la colère, elle, est bénéfique, fondatrice, nous ouvrant résolument au défi, à la confrontation avec l'altérité. Dans la seconde partie du poème, la diminution graduelle du nombre de syllabes par vers ménage l'issue salvatrice du chemin, point d'orgue de la quête.
Merci pour ce partage !
Treize lettres de l'alphabet en tout.
Des vers excessivement courts, dépourvus de rimes, dans une alternance de 3 à 8 pieds.
J'admire la remarquable densité, le travail de virtuose qui permet ce feu croisé d'allitérations obsédantes (« c », « l », « n », « r », « s ») et d'assonances multiples, disséminées dans le tissu du poème.
C'est un véritable petit bijou d'écriture, Annie !
Les quatre verbes à l'infinitif, fixant le cap à suivre, dessinent un mouvement de gradation. Deux d'entre eux, centraux, sont construits en diérèse (« rallier », « se concilier »), appuyant doucement sur l'évidence de l'ouverture sur le monde. Dispensateur d'images particulièrement prégnantes, un abondant champ lexical de la nature (« colline », « ancolie », « narcisse », « écorce », « ronce », « cailloux », « carline », « col ») préside au déroulé de l'évocation. Si la rancune nous referme sur nous-mêmes, nous faisant invariablement remâcher le passé, la colère, elle, est bénéfique, fondatrice, nous ouvrant résolument au défi, à la confrontation avec l'altérité. Dans la seconde partie du poème, la diminution graduelle du nombre de syllabes par vers ménage l'issue salvatrice du chemin, point d'orgue de la quête.
Merci pour ce partage !
jfmoods- Nombre de messages : 692
Age : 58
Localisation : jfmoods@yahoo.fr
Date d'inscription : 16/07/2013
Re: Autre versant
tu poursuis ta route de textes courts et denses dans lesquels la brièvement rejoint le décor d'une émotion intérieure liée à la lecture.
rien à dire,
le jeu des sonorités en alternance donne un violent coup de vent et aère ce neuvain.
bravo, du grand art !
rien à dire,
le jeu des sonorités en alternance donne un violent coup de vent et aère ce neuvain.
bravo, du grand art !
Pussicat- Nombre de messages : 4838
Age : 56
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: Autre versant
Ben voyons, pas réveillée moije
Pussicat a écrit:tu poursuis ta route de textes courts et denses dans lesquels la brièveté rejoint le décor d'une émotion intérieure liée à la lecture.
rien à dire,
le jeu des sonorités en alternance donne un violent coup de vent et aère ce neuvain.
bravo, du grand art !
Pussicat- Nombre de messages : 4838
Age : 56
Localisation : France
Date d'inscription : 17/02/2012
Re: Autre versant
L'âpreté minérale et l'aridité de l'effort habilement empaquetés pour nous offrir ce viatique!
Economie de moyens mais non pas d'astuce.
Quant à la découverte d'un autre monde, l'arrivée au col, voilà qui nous oblige à travailler du chef...
Chapeau!
Economie de moyens mais non pas d'astuce.
Quant à la découverte d'un autre monde, l'arrivée au col, voilà qui nous oblige à travailler du chef...
Chapeau!
Polixène- Nombre de messages : 3287
Age : 61
Localisation : Dans un pli du temps . (sohaz@mailo.com)
Date d'inscription : 23/02/2010
Re: Autre versant
Très beau poème. Sonorités, profondeur du propos.
Peu importe les fines ficelles de l'écriture, ces vers me procurent une émotion complexe, me bouleversent.
Merci pour ce partage.
Peu importe les fines ficelles de l'écriture, ces vers me procurent une émotion complexe, me bouleversent.
Merci pour ce partage.
post scriptum- Nombre de messages : 252
Age : 42
Date d'inscription : 18/11/2011
Re: Autre versant
Bonjour Annie,
ça doit être surprenant de se rencontrer au col après avoir gravi chacun un versant, ici j'ai pensé à l'adret, au versant sous le soleil, "l'autre" serait celui d'où vient l'inconnu, l'ubac.
Je suis aller vérifier de petits trucs :
"La situation sur l'ubac oblige les habitants à adopter des stratégies de compensation ; cela explique pourquoi il est souvent inhabité et très boisé, peu exploitable sur le plan agricole. Il vaut mieux habiter dans l'adret."
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ubac
dans ce contexte, le poème décrirait bien l'adret comme pente de départ, avec "colline calcinée" pour des cultures sur brulis, "où nul ne roucoule" pour dire qu'il n'y a pas d'arbres, tandis que "rallier l'écorce et la ronce" évoquerait l'ubac (le verlan de Cabu !!! mais ça n'a rien à voir ici) et son sol plus sauvage, moins domestiqué.
ça ferait une lecture un peu animiste de retour à la nature, mais avec le vocabulaire, ça peut se lire comme une métaphore "fleur bleue" aussi.
ça doit être surprenant de se rencontrer au col après avoir gravi chacun un versant, ici j'ai pensé à l'adret, au versant sous le soleil, "l'autre" serait celui d'où vient l'inconnu, l'ubac.
Je suis aller vérifier de petits trucs :
"La situation sur l'ubac oblige les habitants à adopter des stratégies de compensation ; cela explique pourquoi il est souvent inhabité et très boisé, peu exploitable sur le plan agricole. Il vaut mieux habiter dans l'adret."
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ubac
dans ce contexte, le poème décrirait bien l'adret comme pente de départ, avec "colline calcinée" pour des cultures sur brulis, "où nul ne roucoule" pour dire qu'il n'y a pas d'arbres, tandis que "rallier l'écorce et la ronce" évoquerait l'ubac (le verlan de Cabu !!! mais ça n'a rien à voir ici) et son sol plus sauvage, moins domestiqué.
ça ferait une lecture un peu animiste de retour à la nature, mais avec le vocabulaire, ça peut se lire comme une métaphore "fleur bleue" aussi.
Re: Autre versant
Pour ajouter au commentaire de jfmoods (si c'était possible) j'ai lu récemment (L. Jerphagnon) que le mythe de Narcisse est à comprendre comme l'impossibilité de vivre hors de la société dans la pensée grecque. Narcisse n'est pas celui qui s'aime trop, mais celui qui refuse d'aimer l'autre.
Il me semble que ce texte est en pleine cohérence avec cette explication du mythe.
Il me semble que ce texte est en pleine cohérence avec cette explication du mythe.
Invité- Invité
Re: Autre versant
C'est très vrai ce thème de l'adret et l'ubac. Un texte avec plein d'antithèses. Une écriture qui justifie le contrepoint des deux mains. Qui justifie qu'on fouille, qu'on cherche. Qu'on s'enrichisse. "calcinée" m'interroge encore, au delà de l'incendie. Tant mieux. Jusqu'au col, comme un passage, définitif, presque. Vraiment très bien.
'toM- Nombre de messages : 278
Age : 68
Date d'inscription : 10/07/2014
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|